Le « mythe »
du RING du Centenaire
La « légende »
du RING de 1983
Bayreuth,
pour quoi faire? 
       

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Il n'y a pas que nous qui n'en pouvons plus !  

 

 

Voici
ce que Richard Wagner

a écrit au début de sa partition de L'Or du Rhin :

«AU FOND DU RHIN - Aube verdâtre, s'éclaircissant vers le haut, s'assombrissant vers le bas de la scène. Dans le haut de la scène, les flots coulent continuellement, de droite à gauche. Dans les profondeurs, les eaux se dissolvent en un brouillard liquide de plus en plus ténu, ménageant un espace sensiblement égal à la taille d'un homme et apparemment abrité du flot qui passe comme nuées  au-dessus de ce fond enténébré. De toute part s'élèvent des récits escarpés qui délimitent la scène, et le sol est formé d'un enchevêtrement de rochers sans la moindre surface plane. De tous côtés, dans l'obscurité la plus épaisse, se devinent d'autres crevasses encore plus profondes.»

Est-ce ce que l'on peut voir....

 

ICI ?...
(Mise en scène : Patrice Chéreau)

ICI ?...
(Mise en scène : Steffan Valdemar Holm
Royal Opera in Stockholm)

 

OU BIEN ICI ?...
(Mise en scène : Peter Hall)

 

Une autre question...
La scène, ci-dessus,
est-elle une copie de...

CELLE-CI ?

CELLE-CI ?

CELLE-CI ? CELLE-CI ?

LE RESPECT
des indications scéniques de Richard Wagner
n'est nullement contradictoire avec
un
RENOUVELLEMENT ESTHÉTIQUE
des mises en scène de ses œuvres...
 

 

LES MURMURES DE LA FORÊT
Siegfried - Acte II

selon Richard Wagner :

  Une épaisse forêt - A l'arrière-plan, s'ouvre une caverne. Le sol monte en pente douce vers le milieu de la scène où se dessine une petite plate-forme. De là, il redescend vers la caverne dont le spectateur ne distingue que le haut de l'ouverture. A gauche, à travers les arbres, on aperçoit une paroi rocheuse toute crevassée.

 

...selon Harry Kupfer...
(Il s'agit du cœur d'une centrale nucléaire
qui a explosé - pour celles et ceux
qui ne l'auraient pas compris)
...selon Sir Peter Hall

 

 

La poésie et la beauté d'un décor interdisent-elles la réflexion ?
 

... selon M. Barry Millington (in Wagner, guide raisonné - Fayard, 1996, p.485) :


«La naïve représentation  féerique de Peter Hall (Bayreuth, 1983) et les cartes postales nostalgiques
d'Otto Schenk
(Metropolitan, 1986-1988) furent appréciées principalement par ceux qui
considèrent les théâtres d'opéra comme un refuge contre l'activité cérébrale.»

 

 

Le respect des indications notées par Richard Wagner, dans ses partitions, concernant la mise en scène de ses œuvres, serait synonyme de stérilité, d'académisme et d'ennui - d'idiotie?... Ceci pour justifier toutes les interprétations scéniques de ses œuvres - puisqu'on ne saurait parler encore de «mises en scène» aux sens premier du terme.

Mais l'argument ne dissimule-t-il pas davantage que le plaisir pervers de faire tenir aux œuvres de Richard Wagner à peu près n'importe quel type de discours ?

Commençons par nous demander ce qu'est devenue la liberté des spectateurs
de comprendre et d'interpréter les œuvres qui leur sont présentées comme ils l'entendent ?...


     Dans le cas de la mise en scène de la première scène de L'Or du Rhin, telle que nous la présentons, ci-dessus, que ce soit dans la production de Sir Peter Hall ou dans les quatre autres productions dont des images sont présentées, chacun est libre de comprendre la scène selon sa sensibilité, ses préoccupations d'ordre intellectuel ou psychologique, voire politique. Libre à chacun de voir et d'entendre ce qu'il souhaite voir et entendre à travers la scène ! C'est par le biais de l'effort que chacun fournira pour donner un sens à la scène que s'exercera et se développera sa liberté.

Or, cette liberté est de plus en plus couramment confisquée par des "metteurs en scène" qui s'arrogent le droit exclusif d'interpréter l'œuvre comme ils l'entendent, d'imposer leurs "visions" de l'œuvre, leur "concept" à l'ensemble des spectateurs.

On rétorquera qu'une interprétation n'est jamais que proposée aux spectateurs (dont la liberté s'arrête donc à l'accepter, voire à la supporter, à à la refuser), que la multiplicité des interprétations est le signe d'une richesse, et de la vie d'une œuvre... Sauf que ce serait ainsi oublier que la somme de toutes les interprétations que l'on pourra donner d'un chef-d'œuvre ne sera jamais égale au Tout !

Toute interprétation d'une œuvre ne peut être que proposée au public, par le biais d'ouvrages critiques.

Le nazisme est accusée à juste titre d'avoir "récupéré" l'Œuvre wagnérienne à des fins de propagande. C'est un fait. Mais il est ici à noter que jamais les nazis ne sont scéniquement intervenus pour transformer les œuvres de Richard Wagner, dans le sens de leur vision des choses.

Même sous le IIIe Reich, chacun demeurait libre de comprendre l'Œuvre Wagnérienne comme il l'entendait. L'art, la musique, l'opéra constituaient même l'un des rares lieux où chacun pouvait exercer sa liberté, sans avoir à en rendre compte à qui que ce soit.

Les mises en scène de Heinz Tietjen, à Bayreuth, dans les décors d'Emil Preetorius n'interdisaient à personne de voir Hitler à travers le personnage d'Alberich ! Et cela seul pouvait donner à penser, pouvait aider à résister...

Mais cela a été sans doute oublié... Car le paradoxe, c'est que celles et ceux qui dénoncent les manipulations que de nombreux metteurs en scène actuels font subir aux œuvres qui leur sont confiées, sont volontiers associés à des conservateurs de la pire espèce, voire - pourquoi pas? - à des nostalgiques du nazisme. Ben voyons....

Quant à l'argument selon lequel les mises en scène "renouvelées" des œuvres de Richard Wagner (notamment) prêteraient à réflexions, tandis que les mises en scène "classiques" ne seraient destinées qu'à divertir le public, - l'argument est évident fallacieux, dans la mesure où quiconque se rend à l'opéra pour se "divertir" ne réfléchira pas davantage grâce à "l'actualisation" que fera subir le metteur en scène à l'œuvre représentée, que s'il assistait à une représentation dite "traditionnelle" !

En revanche, c'est la lecture du metteur en scène qui fera l'objet, le cas échéant, de discussions ! Il suffit d'écouter les conversation à la sortie d'une représentation "actualisée" d'une œuvre : elles tournent autour de la signification que le metteur en scène a entendu donner à l'œuvre, parfois si obscure que chacun s'y perd ! Quant au contenu de l'œuvre originelle, en elle-même, personne ne s'en soucie plus, évidemment. On a l'esprit ailleurs... Et pour cause... Un peu comme si l'on ne cessait de discuter des ouvrages critiques consacrés à A La Recherche du Temps Perdu de Marcel Proust, sans prendre la peine de lire l'œuvre elle-même...

Le théâtre lyrique contemporain est devenu le lieu, de plus en plus couramment, d'une véritable expérience schizophrénique, tant la différence entre ce que l'on voit et ce que l'on entend crée un espace de tensions, parfois insupportable. De sorte que nombre de spectateurs finissent soit par fermer les yeux, soit par regarder et ne plus entendre la musique !

La "mythique" mise en scène de Chéreau, en 1976, à Bayreuth fut à cet égard hautement révélatrice. Elle fut portée aux nues principalement par des amoureux du théâtre qui n'aimaient guère la musique de Wagner. L'expérience n'a plus cessé, dès lors, de se renouveler, jusqu'au grotesque et l'absurde : en témoignent les productions du Ring qui, à Bayreuth, ont succédé à celle, proprement miraculeuse, de Sir Peter Hall ; mais aussi la plupart des récentes productions des œuvres de Richard Wagner en Europe.

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