C'est afin d'être en mesure d'offrir de ses œuvres - de L'anneau du Nibelung, en premier lieu - des représentations modèles, c'est-à-dire conformes à ses intentions, dans un cadre adapté, que Richard Wagner songe très tôt à l'édification d'un théâtre d'un genre nouveau - en fait, dès l'époque où, Maître de chapelle de la Cours, à Dresde (1843/1849), il ne cesse de se battre pour réformer de fond en comble le théâtre traditionnel...

Mais c'est en 1863 qu'il exprime pleinement ses idées dans la Préface à la Première Éditions de L'Anneau du Nibelung - idées qu'il reprend une fois encore, lorsqu'en 1870 il écrit à son ami, mécène et protecteur Louis II de Bavière  : «(Il est clair)... que je devrais disposer de mon propre théâtre pour représenter mes oeuvres, qui ne se sont retrouvées rejetées dans le genre "opéra" que par le plus grand des hasard.»

    Il est nécessaire de rappeler qu'à l'époque de Wagner, le théâtre d'opéra est conçu la plupart du temps sur le modèle du "théâtre à l'italienne" - lieu où le public se rend essentiellement pour se montrer et s'observer. Du reste, on oublie trop souvent que l'une des premières innovations apportées par Wagner fut d'exiger que les lumières soient éteintes dans la salle durant la représentation...

    Richard Wagner entend donc offrir à son Ring un cadre qui diffère du tout au tout des théâtres traditionnels par :

    - L'extrême dépouillement du bâtiment, en briques rouges et en bois. Sur le plan du Théâtre réalisé par Otto Brückwald, on trouve cette annotation, de la main de Wagner : "Enlevez toutes les décorations!"

    - L'absence de foyer au sens habituel du terme. Il se résume ici à un espace situé sous la salle.

 - La disposition de la salle. Pas de loges se regardant l'une l'autre, mais une sorte d'amphithéâtre, très pentu, plongeant vers la scène.

- La fosse orchestrale rendue invisible par deux mantelets en bois.

(Cliquez sur les images pour obtenir des détails)

L'ensemble est destiné à favoriser la "fusion" des spectateurs en un tout, par-delà les classes sociales (les spectateurs sont tous logés à la même enseigne, sur les gradins !), et à focaliser l'attention de chacun sur le déroulement de l'action dramatique, sans que rien ne vienne distraire son attention (à l'époque de Wagner, les musiciens accordaient leurs instruments avant d'entrer dans la fosse orchestrale, et les techniciens étaient munis de chaussons spéciaux afin que nul ne puisse percevoir le bruit de leurs déplacements en coulisses).

    Les répétitions préliminaires, pour la création de L'Anneau du Nibelung, eurent lieu à Bayreuth en 1875. Elles furent suivies, en 1876 de trois cycles de répétitions normales, du 3 juin au 12 juillet, puis du 14 au 26 juillet, et enfin du 29 juillet au 4 août. Du 6 au 9 août eurent lieu les répétitions générales, en présence du roi Louis II de Bavière - et le 1er festival se déroula du 13 au 30 août 1876.

    Si le 1er festival de Bayreuth fut un immense succès artistique, ce fut aussi un désastre financier; de sorte que, du vivant de Richard Wagner, le Festspielhaus ne put rouvrir ses portes qu'une seule fois, en 1882, pour la création de Parsifal.

  Au lendemain de la mort de Richard Wagner, c'est sa seconde femme, Cosima - fille de Franz Liszt - qui prend en mains les destinées du Festival de Bayreuth, avec l'aide du banquier Adolf von Gross, ami de la famille et exécuteur testamentaire de Richard Wagner. Quant à Hermann Lévi, qui a dirigé la Première de Parsifal, il se voit confier la direction musicale du théâtre.

(Siegfried et Cosima Wagner)

Cosima restera à la tête du festival jusqu'en 1905. Siegfried, son fils, prendra sa succession, jusqu'au 4 août 1930, date de sa mort - quatre mois exactement après la mort sa mère.